Carton rouge à John Magufuli

« A l’image de mes concitoyens, je ne sais pas comment oublier cette honte de se faire battre de la sorte sur ses propres terres, je ne sais pas ce qu’il adviendra de notre sélection A à la CAN seniors mais nous avons vécu des moments difficiles lors de cette CAN U17 ». John Magufuli n’a pas goûté, mais alors pas du tout, l’élimination de son équipe cadette dès le premier tour de la CAN U17. Trois matches, trois défaites, les « Serengeti Boys » ont subi la loi du Nigeria, de l’Ouganda et de l’Angola. John Magufuli, vous ne le savez peut-être pas, est depuis trois ans et demi le président de la République de Tanzanie.

Avec tout le respect dû à un chef d’Etat, je reprendrai volontiers le titre d’un ouvrage qui avait fait beaucoup de bruit en France à la fin de l’année 2016, « Un président ne devrait pas dire ça ». C’est incroyable comme les hommes politiques, y compris ceux qui exercent les plus hautes fonctions, aiment à se mettre en avant dès qu’il s’agit de football. Ils jouent à mettre la pression sur les joueurs et surtout sur les techniciens. Si on organise une compétition pour la gagner, mieux vaut ne pas l’accueillir. En vérité John Magufuli a voulu prendre les devants avant la CAN aux mois de juin et juillet en Egypte. L’équipe de Tanzanie n’y a plus participé depuis près de quarante ans. Au Nigeria, en 1980, les « Taïfa Stars » s’étaient inclinés face au Nigeria et à l’Egypte avant de partager les points avec la Côte d’Ivoire. La seule place de la Tanzanie depuis, n’a toujours été qu’une place dans les tribunes ! Cette fois elle sera sur le terrain après être sortie d’un tour de qualification qui n’avait rien de magique avec l’Ouganda, le Lesotho et le Cap Vert. Six matches, deux victoires, deux nuls et deux défaites, six buts marqués seulement pour cinq encaissés. A l’indice de performance dans ces éliminatoires, la Tanzanie apparaissait à l’avant-dernière place. Si la CAF n’avait pas porté à vingt-quatre le nombre de qualifiés pour la phase finale, il est possible que la Tanzanie serait restée une fois encore dans l’antichambre de l’épreuve.

Après l’échec de ses jeunes compatriotes il a également mis en accusation son ministre des sports. « C’est une honte pour le ministre des sports, et si j’avais cette responsabilité, je prendrais mes responsabilités pour que les choses aillent dans le bon sens ». Sous-entendu lors du voyage en Egypte. L’avertissement vaut également pour l’entraîneur Emmanuel Amunike, ancienne gloire des Super Eagles du Nigeria dans la première moitié des années 90.

La petite musique du président Magufuli a un peu changé depuis la qualification. Il avait dit que l’objectif était de passer le premier tour et, pourquoi pas, de viser la finale. Un dérapage mal contrôlé. Il y a quelques années, enfin pas mal d’années, un de mes amis venait d’être nommé ministre des sports peu avant la CAN. Je lui avais aimablement conseillé de ne pas trop se montrer, de laisser la parole aux joueurs et aux entraîneurs, qu’il valait mieux récupérer la victoire si elle venait que de trop se mettre sur le devant avant la compétition. Et ce qui devait arriver arriva. Son équipe ne fut pas en finale et il fut considéré par le public comme le premier responsable de l’échec.

Je n’ai naturellement rien au départ contre le président Magufuli mais je lui rappellerai qu’aucun joueur de son pays n’a de véritable expérience professionnelle à l’inverse de la grande majorité de ses adversaires sénégalais et algériens et qu’une qualification relèverait de l’exploit. Beaucoup reposera sur l’attaquant Mbwana Samatta qui a longtemps fait le bonheur du TP Mazembe avant de partir en Belgique rejoindre le KRC Genk pour lequel il a marqué vingt buts cette saison en Jupiter League avant d’être désigné meilleur africain du championnat.
Dans le monde du sport, le silence d’avant-matches est souvent une vertu.

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