Un Messie à Paris

Depuis quelques jours la rumeur s’amplifiait. Elle s’est confirmée ce mardi 10 août 2021. Lionel Messi est désormais parisien pour, au minimum deux ans, et, peut-être une année supplémentaire. Deux clubs étaient en pole position pour s’attacher les services dela « Pulga » argentine (la « Puce » en espagnol, son surnom), le Paris Saint Germain et Manchester City. Le premier, propriété de la holding Qatar Sports Investments, le deuxième d’Abu Dhabi United Group, deux pays qui ne sont pas les meilleurs amis du monde.

Lionel Messi, comme beaucoup, je l’adore. Il est, pour moi, le meilleur joueur du monde. A ses qualités purement individuelles, il ajoute un esprit collectif. Il ne joue pas que pour lui ; il y ajoute un esprit collectif qui fait toute la différence. Bref, il est unique. Je me réjouis pour les amoureux du football en France et je sais, partout où il se produira avec le PSG qu’il drainera des foules considérables. J’ai connu ces périodes où j’allais voir Pelé, Cruyff ou Maradona. Et je ne peux m’empêcher de penser au départ du Brésilien de son club de toujours, Santos, pour le Cosmos de New York, de celui du Néerlandais de l’Ajax d’Amsterdam pour Barcelone et de celui de l’Argentin de Boca Juniors pour Barcelone et ensuite pour Naples qui le conduira à sa perte.

Mais pour le journaliste et l’homme que je suis-je ne peux m’empêcher de penser au fric, au blé, à l’oseille, au pognon, au flouze, aux pépètes, au pèze, à la thune que cela représente. On parle de plusieurs dizaines de millions d’euros de salaire que cette arrivée de Messi à Paris représente. Dans un pays tout ce déploiement d’argent me dérange comme le mien qui a subi les conséquences catastrophiques de la Covid. J’entends encore les dirigeants du football français réclamer une aide financière de l’Etat. Beaucoup de clubs et pas des moindres se sont retrouvés au bord de la faillite. Certains auront du mal à s’en remettre. Et là on déploie des liasses de billets pour faire venir un joueur.
Mais je pense, plus encore au football africain auquel j’ai consacré bientôt cinq dizaines de ma vie de journaliste. Il est carrément exsangue. Je lisais ces derniers jours un article du quotidien tunisien « Le Temps » (une des meilleures pages de football du continent) qui décrivait la situation dramatique des clubs de son pays. L’Espérance devrait pouvoir s’en sortir mais que peut-il advenir de l’Etoile du Sahel, du Club Sportif Sfaxien et du Club Africain, des clubs qui ont fait rayonner le pays. Bien sûr la pandémie n’est pas seule en cause. L’appauvrissement des uns ne fera évidemment pas le bonheur des nantis. Et je suis inquiet pour l’ensemble des footballeurs de ce continent dont certains appelés « professionnels » n’ont perçus pendant des mois et des mois aucun salaire. Nombre d’entre eux ont dû, pour compenser, se livrer à des petits boulots.

Les hauts responsables de la Confédération Africaine de Football ont préféré ne pas voir en multipliant les compétitions. Elles ne feront pas venir plus d’argent. Et d’abord qui les financera ? Viendra le jour où les Etats, sans lesquels nombre d’entre elles ne pourraient être organisées, faute de moyens financiers. Le football de haut niveau coûte cher, très cher. Surtout les déplacements en avion. Et je ne veux même pas évoquer l’obligation de la création de stades dont la rentabilité ne sera jamais assurée.
Cela nous éloigne de l’arrivée de Lionel Messi à Paris. Pas autant qu’on ne le pense. Le football est universel et ne peut pas se concentrer uniquement sur l’Europe n’en déplaise à la FIFA. Il risque de déchanter après avoir compter les pépètes tombées d’un véritable déluge.

Le football français a déchanté ces dernières semaines, éliminé en huitième de finale de l’Euro, écarté dès le premier tour du Tournoi olympique de Tokyo. J’espère que la venue de Messi réenchantera les tribunes d’Angers, de Clermont-Ferrand et de Troyes. Je pense aussi que mes confrères doivent pousser un énorme ouf de soulagement. Les amoureux du football sont tous dans l’impatience de ce petit bonhomme venu nous mettre en quelque sorte la « Puce » à l’oreille…Oui le talent extrême est encore parmi nous. Le Messie nous accorde le privilège de son arrivée.

Gérard Dreyfus

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