Le foot pro en Afrique, un leurre ?

A quelques semaines du démarrage de la phase terminale de la Ligue des champions et de la Coupe de la Confédération, modification du calendrier oblige (il est désormais copié sur celui de l’UEFA !!!), le quotidien tunisien « La Presse, dont les pages sportives figurent parmi les toutes meilleures de la presse africaine, vient de procéder à une très intéressante étude sur le professionnalisme dans son pays

« Hormis l’Espérance, l’Etoile du Sahel, le Club Sportif Sfaxien et, à un degré moindre le Club Africain, dont on connaît l’énorme implication des présidents dans leur financement, les clubs d’élite croulent sous les dettes. Les autres clubs survivent dans un état végétatif. La formation des jeunes est quasi absente dans les clubs ». L’homme qui parle s’appelle Mohamed Memni, président de la Jeunesse Sportive kairouanaise.

 « Le sport en Tunisie n’a pas su créer de nouvelles richesses, aucune structure n’a été installée pour ralentir cette course effrénée à l’endettement. Il est désolant de parler de professionnalisme en Tunisie alors que les clubs sont en panne de moyens budgétaires voire d’infrastructure. Les clubs ne possèdent pas des terrains même pour les entraînements. Ils sont toujours dépendants des équipements sportifs publics ».
Ce constat on pourrait l’appliquer à l’ensemble des clubs de football sur le continent. Bien sûr on m’opposera le nom de quelques exceptions mais ce ne sont que des raretés dans un monde où le professionnalisme fait rêver sans coller à la réalité. La Tunisie est l’un des seuls pays à pouvoir se targuer d’avoir trois grands clubs qui figurent régulièrement au sommet du football continental.

 
« La Presse » a également questionné longuement Ameur Hizem, un ancien sélectionneur de l’équipe nationale.
« A l’exception de trois ou quatre équipes les autres clubs sont marginalisés dans la mesure où ils livrent une lutte perpétuelle pour prouver leur existence. Ils assurent leur survie grâce aux subventions octroyées par l’Etat et les autorités régionales et locales. Cette situation, qui n’a cessé de se détériorer ces dernières années, a été provoquée par l’application du professionnalisme, à mon avis mal étudié pour ne pas dire parachuté. Afin de réussir, ce système appliqué notamment en Europe nécessite des moyens financiers énormes, une infrastructure costaud et une formation très poussée au niveau des jeunes talents sans oublier un encadrement adéquat des entraîneurs. Or, dans notre pays, tous ces ingrédients n’ont pas été pris en considération, ce qui explique d’ailleurs ce passage brusque du professionnalisme. On aurait dû par exemple appliquer le semi-professionnalisme dans un premier temps tout en préparant les conditions adéquates pour passer au professionnalisme proprement dit. Il est inconcevable d’appliquer ce système avec une infrastructure lamentable, des joueurs mal formés et mal encadrés, des salaires très élevés pour assister à des spectacles le plus souvent amorphes et sans charme ni suspense.  En l’absence d’une véritable structure régissant le football « professionnel », tel que cela se fait en Europe où les clubs fonctionnent comme de véritables entreprises, il demeure difficile d’effectuer des comparaisons pour mieux illustrer les différents manquements ».

Autrefois tous les internationaux tunisiens étaient issus des clubs locaux. Ce n’est plus le cas comme ce n’est pas davantage le cas de la très grande majorité de leurs pairs africains. Et on ne parle pas de tous les joueurs formés, possédant une double nationalité et ayant été formés hors de leur pays. Cela ne date pas d’aujourd’hui, le football africain a chaussé les crampons de l’Europe sans avoir pu s’en donner les moyens. On parle ça et là de professionnalisme. On devrait parler d’un monde étrange venu d’ailleurs. L’Afrique doit inventer ses propres normes, en harmonie avec ses capacités financières. Disons les choses telles qu’elles sont, l’argent est le nerf du football. Les idées sont indispensables, la formation des plus jeunes est indispensable, celle des dirigeants l’est pareillement. Question : comment trouver les ressources autres que celles des Etats. Sans ces derniers il n’y aurait pas de compétitions panafricaines. Il serait grand temps que des hommes de bonne volonté, ayant la passion du football chevillée au corps se réunissent afin d’en parler entre eux. La solution sera collective. Si l’Espérance de Tunis, l’Etoile Sportive du Sahel de Sousse et le Club Sportif Sfaxien ont réussi à sortir de l’anonymat et à se construire un palmarès c’est parce que des hommes ont eu des idées et ont su les mettre en application. Je rappelle que, le 15 janvier dernier, l’Espérance a fêté son centième anniversaire. Cela a un sens, non !
Et bravo à « La Presse » de concourir à la réflexion sur la situation du football chez elle qui vaut, je le répète, pour tous les pays d’Afrique.

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