Nous sommes tous Marega !

Dimanche 16 février 2020, stade Afonso Henriques à Guimaraes. Il est 19h45. Le match tourne à l’avantage du FC Porto. L’attaquant malien Moussa vient de marquer le deuxième but de l’équipe visiteuse. Dans la foulée il prend un carton jaune pour avoir célébré son but avec un siège jeté sur lui depuis les tribunes. La scène n’est pas du goût des spectateurs venus voir le Vitoria s’imposer chez lui. S’en suit une envolée de cris de singes, une bronca comme on en entend hélas trop souvent.

Devant cet emballement infernal de déchaînement raciste, Moussa Marega décide de quitter la pelouse. Ses camarades de club essaient bien de l’en dissuader, de le retenir contre son gré par le maillot. Rien n’y fait.« Avec les insultes, avec les cris de singes que je recevais, je ne pouvais pas rester sur cette pelouse. Ce n’était plus possible. Je ne pouvais pas rester sur cette pelouse » dira-t-il après la partie.


Sauf erreur de ma part, je n’ai pas souvenir d’une telle attitude. Les joueurs africains ou d’origine africaine ont souvent été, depuis plusieurs décennies, des proies faciles pour des prétendus supporters. Mais ils ont été au moins aussi souvent été livrés à leur humiliation solitaire, l’intérêt de l’équipe passant avant l’honorabilité du joueur. Le match s’est poursuivi jusqu’au coup de sifflet final d’un arbitre qui n’a pas su prendre la bonne décision, pas plus que les joueurs des deux camps qui auraient dû, tous ensemble, abandonner le match.
L’événement n’a pas échappé aux plus hautes autorités du Portugal. Le président de la République Marcelo Rebelo de Sousa, a mis en garde contre les conséquences « dramatiques » du racisme et de la xénophobie. « Nous devons tous exprimer notre solidarité envers le joueur et le refus total de ce type de comportement », a déclaré le Premier ministre Antonio Costa. Les deux présidents, de la fédération et de la Ligue, se sont dit déterminés à « tout faire pour que cet épisode de racisme ne reste pas impuni ».

Le voisin espagnol, quelques jours auparavant avait vécu un événement un peu identique avec les insultes racistes proférées à l’encontre d’Inaki Williams, international espagnol d’origine ghanéenne. Lui n’a pas quitté le terrain lors du match contre l’Espanyol de Barcelone mais les autorités du football ont déclenché une enquête. Douze individus ont été identifiés comme les auteurs des cris par le club catalan. Le nom de certains d’entre eux ont été communiqués au club et à la police. On pourrait citer d’autres exemples.

Dans une Europe de plus en plus en plus en proie à des mouvements extrêmistes, le football ne peut pas détourner la tête en disant « ça leur passera ! ». On ne peut pas toujours botter en touche et se détourner des vrais problèmes. Les réactions des politiques portugais semblent positives. Mais on ne peut plus se contenter de déclarations. Il faut des actes.
Ce que je sais c’est qu’il y a deux grandes figures du football portugais qui doivent se retourner dans leurs tombes, Mario Coluna, capitaine de la Seleção, troisième de la Coupe du monde 1966, et son complice Eusebio, meilleur buteur en Angleterre, et dont la statue en bronze orne l’entrée du stade de la Luz qui est celui de son club, le Benfica de Lisbonne.
L’UEFA et la FIFA ne peuvent pas toujours se taire. Il leur revient de lancer sans pitié la bataille contre le racisme.
Quant aux joueurs africains, peut-être devraient-ils se concerter pour trouver une réponse commune. Pourquoi ne pas porter, chacun pendant les matches, un brassard pour montrer leur solidarité et leur détermination à expurger toutes les manifestations de racisme dans les stades.


Oui, si nous ne le sommes pas tous encore, nous devons être Marega.

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