La CAN tous les quatre ans…

Le 1er février dernier, à Salé au Maroc, lors d’un séminaire organisé par la CAF, le président de la FIFA, a lancé une véritable bombe. A savoir l’organisation de la Coupe d’Afrique des Nations tous les quatre ans et non plus tous les deux ans comme cela est le cas depuis 1957.

La suggestion de Gianni Infantino tournait autour de deux axes. L’un sportif « cela la rendrait plus attrayante au niveau sportif ». L’autre économique : « cela permettrait à la CAN, qui génère vingt fois moins de revenus que l’Euro, d’être plus commercialement viable ».
Plus attrayante ? La CAN est le rendez-vous le plus important de toutes les manifestations sportives organisées en Afrique. Elle fait partie depuis plus de soixante ans de l’ADN du continent. Elle dépasse très largement le seul monde du sport. Elle est le rendez-vous incontournable des Africains qui, selon un sondage, effectué en juillet 2017 par la chaîne de radio RFI, avait clairement indiqué son hostilité à un changement de périodicité.
Plus de revenus ? La CAN est la première source de revenus financiers de la Confédération Africaine de Football. Des ressources à la mesure des potentialités économiques de l’Afrique. Nier ses réalités est une hérésie, une promesse qui ne saurait valoir garantie.

Parmi les joueurs, certains ont, à l’image de Didier Drogba, apporté un soutien à la proposition. « Cela peut être une bonne chose parce que cela donnerait une saveur bien particulière à ce trophée par sa rareté ». La division Afrique de la FIFPro (le Syndicat mondial des footballeurs professionnels) a abondé dans ce sens. Mais le camp des joueurs hostiles au projet a été tout aussi prompt à s’inscrire en faux, à l’image d’une autre figure de légende, Samuel Eto’o, pourtant proche des dirigeants de la FIFA et de la CAF. « Est-ce l’intérêt des Africains d’organiser une CAN tous les quatre ans ? Je crois que c’est plutôt celui des Européens. Ils veulent avoir à disposition les Mohamed Salah, Sadio Mané ou Pierre-Emerick Aubameyang », a répliqué le Camerounais.  

Il est un commentaire qui n’a pas été entendu. Il ne portait pas sur la périodicité quadriennale mais sur le déplacement de la compétition. « Si vous déplacez la Coupe d’Afrique des Nations en juillet, c’est pire qu’avant pour les clubs » (européens, entre parenthèses), expliquait Claude Le Roy. « Les joueurs vont rater les préparatifs d’avant-saison avec leurs clubs et cette partie de la saison est la plus importante pour les joueurs à cause de la nouvelle saison ». « Si nous transférons un peu plus tard en juillet, aucun joueur ne reviendra pour les préparatifs d’avant-saison et ils se reposeront pendant une à deux semaines et commenceront la saison plus tard que les autres joueurs ».

Gianni Infantino parle souvent d’argent, trop souvent. Il ne peut pas, il ne doit pas se substituer à la volonté de tous les Africains. Il ne suffit pas d’effectuer des déplacements – de courte durée – d’aller serrer les mains de quelques Chefs d’Etat africains, de déclarer qu’il aime l’Afrique, puis de regagner Zurich pour prétendre connaître les Africains qui méritent un peu plus de respect. Un homme, une poignée d’hommes ne peuvent pas décider à la place de centaines de millions d’Africains. Ces derniers méritent un peu de respect. Le temps où le sort de ce continent était décidé « ailleurs » est révolu.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *