L’image qui m’est spontanément venue à l’esprit est celle
du dompteur, dans un cirque, qui agite son fouet en frappant le sol de toutes
ses forces pour demander à son lion de faire le beau en s’exclamant « qui
est le maître ? »
Le dompteur c’est Ahmad Ahmad, le Lion c’est le Cameroun.
Pendant des mois, le premier a soufflé le chaud et le froid donnant le
sentiment qu’il en voulait au second. Et puis, brutalement, il s’est passé
comme un déclic qui a donné à penser que nous avions inventé une fausse
querelle pour ne pas dire plus.
Que le Cameroun ait connu des difficultés, c’est avéré. Ni plus, ni moins que
la plupart des autres pays susceptibles d’accueillir la Coupe d’Afrique des
Nations. Ce n’est pas une mince affaire. Elle exige un très haut niveau
organisationnel surtout avec vingt-quatre équipes sur la ligne de départ. Ce n’est
pas une tâche facile. Il faut faire des choix, construire des infrastructures
qu’il sera très difficile de rentabiliser et en négliger certaines autres,
sûrement plus utiles.
Observez les 54 pays membres de la Confédération Africaine de Football. Combien sont-ils effectivement en mesure de se lancer dans pareille aventure ? On peut les compter sur les doigts d’une main. Ils ne sont pas plus. Alors le Cameroun fera au moins aussi bien que tous ceux qui l’ont précédé depuis 1957. Peut-être même mieux. Il suffirait que tous les stades de la compétition affichent complet pour qu’une grande partie du défi soit relevé.
Avant la décision de confirmer l’organisation de la CAN au Cameroun, on a assisté à une sorte de partie de billard à trois, FIFA – CAF – FECAFOOT. La première a tiré la première en décidant d’organiser son championnat du monde des clubs au mois de juin en bousculant le calendrier qui avait réservé ce mois pour la CAN. La deuxième a déplacé son épreuve au mois de juillet pour finalement convenir que l’organiser à cette période-là relevait du défi à des conditions climatiques inhospitalières au jeu de ballon. Ajoutant que le transfert de dates (9 janvier – 6 février 2021) répondait à la demande du Cameroun comme s’il s’agissait d’une faveur.
Le football africain va, une fois encore, s’attirer les
foudres des clubs européens peu enclins à libérer leurs joueurs pour la
compétition africaine. Par curiosité je me suis plongé dans mes archives.
Celles concernant la dernière CAN, en Egypte. Si l’on ne prend en compte que
les clubs de première division, les Français ont eu 41 joueurs concernés, pas
tous des titulaires, les Anglais 28. 7 joueurs du Stade Rennais figuraient sur
les listes officielles, 4 étaient sous contrat avec une autre équipe française,
Dijon, et 3 l’étaient avec Liverpool (Naby Keita, Salah et Sané). Au mois de
janvier 2021 les clubs anglais feront la gueule, ils se sont toujours considérés
comme les maîtres absolus du football.
Les Français ont pris l’habitude de cette CAN en janvier. Je me souviens de ce
responsable d’un club de première division qui avait vu cinq de ses joueurs s’en
aller porter le maillot de leurs sélections nationales. Il avait juré que plus
jamais il ne recruterait un joueur africain. Six mois plus tard cinq nouveaux Africains
signaient avec le club.
La règle de la FIFA est sans équivoque : « Un club ayant
enregistré un joueur doit mettre ce joueur à la disposition de l’association du
pays pour lequel le joueur est qualifié, sur la base de sa nationalité, s’il
est convoqué par l’association en question. Tout accord contraire entre un
joueur et un club est interdit ».
Tout cela ne serait sans doute pas arrivé si la CAF n’avait pas mis son destin entre les mains de la FIFA. Ses grandes orientations sont, chaque semaine, plus insaisissables. Nous, on en a perdu nos boussoles. Et la question des dates de la CAN reviendra en 2023 et en 2025 puisque la Côte d’Ivoire et la Guinée, pays désignés pour héberger les deux éditions, sont soumis aux mêmes conditions climatiques que celles du Cameroun…